EPI 5e : La République des lettres

Non, Beatus n’est pas que le nom d’un collège. C’est surtout un grand humaniste, ami proche du « prince des humanistes », Erasme. Né d’une époque où Sélestat brillait dans l’humanisme rhénan, à côté de ses concitoyens Bucer, Wimpfeling, Schurer, Mentel… Erasme ne disait-il pas de Sélestat après son séjour en 1514 :

Illustre Sélestat, (…)

D’où vient ton génie, si fécond, si généreux ?

Quels astres brillèrent au-dessus de ton berceau ? (…)

Parmi toutes les cités (…) aucune n’est plus prospère que toi. (…)

Le privilège qui n’est qu’à toi, c’est que seule, toi si petite, tu donnes le jour

A autant d’hommes distingués par les mérites de l’esprit (…)

Pour ne point nommer les autres, l’illustre Beatus Rhenanus

Savant dans l’une et l’autre langue, ne suffirait-il pas à ton bonheur?

D’autres enfantent des corps, toi tu enfantes des génies. (…)

C’est en souvenir de ton accueil qu’Erasme a pour toi composé ces vers

Afin de redonner vie à ceux que la mémoire oublie, les élèves de 5e ont travaillé sur le XVIe siècle à partir des grands personnages de la Renaissance. En histoire géographie, il s’est agi de découvrir par binôme ces grands personnages à l’aide de documents historiques, puis de les présenter lors d’un exposé oral illustré d’un diaporama. Et ainsi de compléter la « fiche de personnage » ci dessous :

Ce n’est qu’après ce gros travail de présentation que les élèves ont pu remettre au gout du jour la « République des lettres » :

La « République des lettres » désigne au XVIe siècle un espace virtuel qui dépasse les frontières et réunit les lettrés européens à travers des écrits et des rencontres autour de valeurs partagées, et rendu possible grâce à une langue européenne commune, le latin. Les humanistes, scientifiques, découvreurs… sont ainsi en contact constant par le biais des lettres et des voyages.

Les élèves ont alors été invités à la schizophrénie en se prenant pour l’un de ces personnages et en écrivant une lettre, avec citation latine s’il vous plait, à un autre personnage qui lui était lié. C’est ainsi que Cortés a pu discuter de sa conquête de l’empire inca avec Cortés qui avait réalisé celle des Aztèques, où que le pape Jules II pouvait commander à Michel-Ange la chapelle Sixtine.

Florilège (n’hésitez pas à cliquer sur l’image pour pouvoir la lire en plus grand) :

  • Léon X, le pape, envoie une lettre à Martin Luther, en train de créer le protestantisme ; ce dernier lui répond. Ambiance… En toute inimitié bien sûr !

 

  • Dans les relations peu cordiales encore, l’espagnol Las Casas, fervent défenseur des Indiens d’Amérique alors exploités par les colons espagnols, écrit à Sepulveda, son principal opposant. Leurs arguments seront exposés lors de la controverse de Valladolid.

 

  • Toujours parmi les relations conflictuelles de l’époque : mais qui a donc inventé l’imprimerie ? Gutenberg, comme l’histoire l’a retenu, ou le Sélestadien Mentel, comme certains aimeraient le penser, en premier son petit fils qui avait fait courir la rumeur. Ce ne sont pas les lettres suivantes qui parviendront à départager les deux imprimeurs de la première heure. Les historiens, eux, ont tranché… en défaveur du Sélestadien.

  

  • Beatus Rhenanus écrit à Erasme, pour parler… littérature bien évidemment. Une relation plus filiale et amicale que les trois précédentes !

 

  • Dans le même genre, Budé et Rabelais ont des projets ensemble… Ecrire et éditer un livre en collaboration, quoi de plus normal pour les deux grands humanistes français (le groupe étant composé de 3 élèves, Rabelais a eu droit à deux réponses !).

  • Autre projet de collaboration entre les réformateurs Calvin et Bucer :

  

  • Toujours dans les collaborations, Galilée écrit au petit fils de Copernic pour travailler sur sa théorie de l’héliocentrisme. A noter que le petit-fils de Copernic a cherché lui aussi, comme son grand père, à travailler sur le soleil, au point de brûler, et pas qu’un peu, sa missive…

  

  • Attention, navigateurs en compétitions : Vasco de Gama et Christophe Colomb en route vers les Indes !
  • Et pour finir, quelques lettres, probablement perdues par la poste de l’époque, et qui n’ont pas (encore) eu de réponses… A moins qu’un tour aux archives les fasse réapparaître… Dans l’ordre :
    • le conquistador Cortés écrit à Pizarro : qui a dit que ce n’était que des hommes sans foi ni loi, amoureux de l’or et du sang ! Ils savent s’écrire… pour se féliciter de leurs massacres et pillages respectifs…
    • le médecin Vésale écrit à son confrère Paré pour opérer le roi Henri II blessé d’un coup de lance, et qui mourra peu après dans d’abominables souffrances… (l’histoire eut-elle été différente si Paré avait répondu à Vésale ? …)
    • et pour finir Julien de Médicis commande à Léonard de Vinci le portrait de sa bien-aimée… que l’histoire nommera la Joconde (hypothèse peu probable mais défendue par un historien de l’art…).

    

Ils s’y sont crus, et j’espère que vous aussi… Avec probablement un peu plus de fautes d’orthographes qu’à la Renaissance, malgré les nombreuses corrections apportées par Mme Offenstein… Bravo aux élèves qui ont bien incarné leur personnage et ont pu découvrir la richesse incroyable de la Renaissance, et prendre goût nous l’espérons au latin qu’ils ont entraperçu et pourront perfectionner l’an prochain s’ils le désirent !